Jeudi 16 mai à 13h, au MH (salle Auguste Chevalier) et en visio, par Nicolas Naudinot, Professeur d’Archéologie préhistorique au Muséum, UMR7194 HNHP
Intervenant :
Nicolas Naudinot, Professeur d’Archéologie préhistorique au Muséum, UMR7194 HNHP
Résumé :
Découvert dans les années 1980 et fouillé depuis 2013, le petit abri du Rocher de l’Impératrice est aujourd’hui un des très rares sites au contexte maitrisé pouvant être attribué à un moment clef du Paléolithique supérieur : l’Azilien ancien (autour de 14000 cal. BP), période qui voit les systèmes magdaléniens se déliter au profit de nouveaux concepts techniques et plus généralement de modifications profondes des systèmes. Cette petite cavité, qui surplombe aujourd’hui le fond de la rade de Brest et l’estuaire de l’Elorn, était située très loin du littoral durant le Tardiglaciaire. Elle dominait à l’époque une vaste plaine alluviale parcourue par de nombreux fleuves côtiers se jetant en mer au large de l’actuelle Île d’Ouessant. L’abri semble avoir été occupé, à plusieurs reprises, par de petites communautés durant des périodes courtes et pour des tâches resserrées : préparer/réparer les équipements de chasse et traiter le gibier. L’approche techno-éco-fonctionnelle collective et intégrée de l’industrie lithique actuellement disponible a permis de mieux définir le système technique de l’Azilien ancien avec un intérêt tout particulier pour des outils emblématiques de la période : les lames à retouches rasantes, dont les modalités de fabrication, d’utilisation et de gestion font actuellement l’objets d’une recherche collective à l’échelle de l’Arc atlantique dans le cadre de l’ANR TAIHA (Langlais et Naudinot coord.). La découverte d’une centaine de fragments de plaquettes de schiste gravées, dont certaines ornées d’aurochs et surtout de chevaux, a également permis d’étendre au-delà du sous-système lithique nos recherches sur les transformations des systèmes qui marquent les alentours de 14000 cal. BP en abordant les comportements graphiques/symboliques de ces communautés. Plus anciens comportements graphiques actuellement connus en Bretagne, ces témoignages sont extrêmement rares pour l’ensemble de l’Azilien ancien. Les recherches collectives menées sur ce matériel montrent que contrairement à ce qui était jusqu’alors envisagé, les premiers temps de l’Azilien voient se maintenir des conventions stylistiques tout à fait comparables à celle du Magdalénien récent. Voilà qui amène à envisager l’idée d’une arythmie entre transformations du sous-système technique lithique/osseux et sphère symbolique, venant questionner par la même nos paradigmes qui laissent à voir le plus souvent les entités préhistoriques comme des ensembles clos.